L’artiste François Michaud, notamment en vedette à l’intérieur du livre D’histoires en images, a fait des changements climatiques le fer de lance de son inspiration créatrice. Rencontré à son studio de Victoria, l’homme se dévoile autant que ses œuvres… 

« Je viens de France, je suis ici depuis 2014, lorsque j’ai pris ma retraite », commence celui qui a enseigné à l’École des beaux-arts de Sète, à côté de Montpellier. Selon lui, il s’agit d’une petite école située dans l’une des villes les plus artistiques de la France. « C’est le terreau de la figuration libre. La ville est réputée pour ses artistes et l’art contemporain. »

Son parcours d’artiste l’amène un jour à faire une résidence à l’École Victor-Brodeur de Victoria, où il rencontre sa femme. L’artiste crée une immense sculpture en bois en forme de cœur. « J’ai échangé un cœur pour un cœur », dira-t-il. D’autant plus qu’à ses dires, l’artiste s’adapte toujours à son lieu géographique pour s’inspirer. « En arrivant ici, j’ai changé de technique. J’ai fait une sorte de synthèse avec le côté très coloré de la méditerranée et le côté animalier qu’on utilise ici, comme les loups et les ours. C’est cette double culture que je mixe ici. »

Il note qu’au Canada, les artistes dessinent souvent les mêmes animaux. « Quand je suis arrivé, je dessinais des perroquets, des éléphants, des singes, mais les gens me disaient : mais ce n’est pas Canadien ! Ça m’a perturbé. Il manque de représentation de l’immigration dans cette façon de toujours dessiner ce que représente le Canada. »

Démarche environnementale

En ce qui a trait à sa démarche artistique, celle-ci est résolument tournée vers l’environnement, et ce depuis longtemps. « Ça fait 35 ans que je travaille autour des problématiques environnementales. J’ai toujours été fasciné par la préhistoire et par l’idée de la création de l’œuvre artistique. Les premières peintures rupestres, c’est quelque chose qui me fascine, comme l’idée des champs de blé. Comment est-on passé du nomadisme à la sédentarisation ? Lorsqu’on a commencé à cultiver le blé, on a commencé à se sédentariser, on a fermé des espaces. C’est pour ça que je dessine souvent une barque dans mes œuvres, c’est signe de sédentarisation, c’est le premier véhicule que l’homme a fait pour se déplacer. »

Selon lui, la sédentarisation a fait en sorte que l’Homme est bouleversé. « Dans les prochaines années, on peut s’imaginer le niveau de l’eau augmenter d’un ou deux mètres et d’un seul coup, on réalisera ce qu’est la migration de masse, car la ville de New York risque d’être complètement inondée, par exemple. »

C’est cette réflexion artistique qui le fait continuer. « Faire de la peinture pour faire de la peinture, ça ne m’intéresse pas. On vit dans un changement, et mon rôle, c’est d’en parler », insiste François Michaud.

Qu’est-ce qu’un artiste ?

L’artiste est très prolifique. Son studio compte plus d’une centaine de tableaux et de sculptures de toutes sortes. « Ici, j’ai dû repartir à zéro. Ce n’est pas facile non plus avec les difficultés linguistiques, car j’ai un problème auditif. De plus, au Canada, on n’a pas la même notion du nom artiste qu’en France. Pour moi, un artiste vit pour son art, il dort en y pensant, il vit des échecs, il recommence, etc. Il y a une réflexion derrière sa démarche artistique, car il souhaite soulever des questions… c’est ça qui m’intéresse ultimement. » Il ajoute que son cœur est à l’écologie. « C’est ce qui est le plus important pour moi. Mon art n’est pas politique. Les politiciens ont des combats d’égo, ça me désole. » François Michaud est tellement captivé par son art qu’il n’envisage pas d’arrêter de créer. « Même si je ne peins pas chaque jour, j’y réfléchis toujours et après, je peux peindre pendant 10 h par jour. »

Une chapelle qui change de décor

Un de ses plus grands projets a été celui de peindre l’intérieur d’une chapelle en France, projet pour lequel il a obtenu le soutien du Conseil des arts du Canada. Chaque six mois, un nouvel artiste recommencera le travail à zéro, représentant le temps qui change et qui évolue. « Le jour du vernissage, le Consul m’a dit : aujourd’hui vous ne représentez plus la France, vous représentez le Canada ! C’est important pour moi de me dire que j’appartiens maintenant à deux cultures », partage-t-il.

François Michaud admet désirer vivre dans un univers francophone. « On aimerait peut-être faire un échange pendant un hiver vers le Québec. J’ai besoin d’être dans une culture francophone. Sherbrooke m’intéresse beaucoup en raison des universités et de la nature. »

L’artiste termine sur une note philosophique qui révèle sa sensibilité. « Pour moi, les deux choses les plus importantes dans la vie sont de faire ce que l’on aime et se sentir aimé. »

Vous pouvez voir une galerie de ses œuvres en cliquant sur ce lien.